Col de Suzon

Renardo n’avait jamais parcouru pareil chemin, entièrement couvert de pierres. A n’en pas douter c’était un chemin des Hommes, car il avait leur odeur. Pour ça, il n’était pas dur à suivre et c’était drôle de sauter d’une pierre à l’autre. Cela dura un moment puis ils quittèrent le Grand Eboulement.

Alors son ami se retourna vers lui :“chut ! fit-il, à partir de maintenant, c’est plein de Rats-Sans-Queue*…”. En continuant à monter au milieu des champs de Poireaux-Bleus-Brûlants*, ils entendirent souvent la fuite des Rats-Sans-Queue mais ne parvinrent pas à en attraper un seul. Par contre ils gobèrent une foule de Mange-Crottes* qui se traînaient sur le chemin, sur les traces des Bêtes Blanches. Ils parvinrent ainsi jusqu’au passage.

A peine l’avaient-ils atteint qu’ils entendirent, venant de l’autre côté, “scheeeeeeeeeee !”. Plusieurs groupes de Scheeeeeeeee les épiaient avec méfiance. Au bout d’un moment ils se turent et se remirent à dévorer l’herbe, sauf les jeunes qui jouaient à poursuismoi. Renardo et son ami restèrent longtemps là-haut puis s’en revinrent par le même chemin. A un moment, Renardo s’étonna de ce que le Grand Eboulement, sous eux, fût ridé comme la peau du ventre de sa mère après qu’il eût tété… mais son ami lui répondit qu’il n’avait jamais vu personne téter le Grand Eboulement. Près de la Tanière,ils se trouvèrent un trou et dormirent l’un contre l’autre, se réveillant juste pour uriner, se laver, écouter les bruits et sentir les odeurs qui leurs parvenaient et observer les Hommes-Araignées pendus au bout de leur fil dans la Grande-Paroi.